Menu
Vous êtes ici : Accueil > Actualités > Droit de la famille : la protection contre les violences faites aux conjoints pendant la crise sanitaire. Comment l’assurer ?

Droit de la famille : la protection contre les violences faites aux conjoints pendant la crise sanitaire. Comment l’assurer ?

Le 21 novembre 2020
Droit de la famille : la protection contre les violences faites aux conjoints pendant la crise sanitaire. Comment l’assurer ?

Après un article sur la protection contre les violences faites aux enfants pendant la crise sanitaire (mois d’avril 2020) et en complément de mon article sur l’ordonnance de protection judiciaire (mois de novembre 2018) je présente aujourd’hui les différents dispositifs relatifs à la protection contre les violences faites aux conjoints.

En effet, les derniers chiffres publiés par le Ministère de l’Intérieur font état d’une augmentation considérable entre 2018 et 2019 des victimes de violences entre conjoints soit une hausse de 16% pour atteindre un total de 142 310 victimes dont 88% de femmes (soit un total de 125 840 femmes).

En 2019, il a été comptabilisé 146 féminicides et 27 hommes tués par leur partenaire ou ex-partenaire de vie.

Avec la crise sanitaire de l’année 2020 et ses deux confinements, il est fort à parier que ces chiffres vont encore augmenter, sachant que lors du premier confinement, les interventions des forces de l’ordre à domicile pour des violences conjugales avaient augmenté de 42%.

Dans le contexte actuel, comment protéger les victimes, essentiellement des femmes, contre les violences dont elles peuvent être l’objet de la part de leur compagnon, mari ou ex-compagnon ou ex-mari ?

 

Plusieurs dispositifs sont possibles :

 

*Tout d’abord, des dispositifs permettant de signaler, de parler ou s’informer :

 

-          Un appel aux numéros d’urgence à savoir :

 

. le 112 : appel d’urgence dans l’ensemble de l’Union européenne, accessible à partir d’un téléphone fixe ou portable, même sans carte SIM, ni crédit, avec n’importe quel opérateur européen

 

. le 17 : appel à la police ou la gendarmerie

 

. le 3919 afin de bénéficier d’une écoute, d’une information ainsi que d’une orientation vers des dispositifs d’accompagnement et de prise en charge.

Les appels au 3919 sont désormais possibles du lundi au vendredi de 9 h à 22 h et de 9 h à 18 h les samedis, dimanches et jours fériés.

Lors du premier confinement et plus précisément au mois d’avril 2020, le numéro 3919 a reçu 10 000 appels soit le double du mois d’avril 2019.

 

.En cas d’impossibilité de s’exprimer oralement, il est possible d’envoyer un SMS au 114.

Ce numéro habituellement destiné aux personnes sourdes et/ou malentendantes, s’adresse désormais également aux personnes se trouvant dans une situation où alerter oralement risquerait de les mettre davantage en danger.

 

. le 01 40 47 06 06 pour les victimes en situation de handicap.

Ce numéro fonctionne le lundi de 10 h à 13 h et de 14 h 30 à 17 h 30 + le jeudi de 10 h à 13 h.

 

.Autre numéro permettant de bénéficier d’un accueil personnalisé et d’une orientation spécifique : 116 006.

Ce numéro est accessible partout en Europe.

Il s’agit d’un service gratuit, anonyme et confidentiel qui est géré par l’association « France Victimes ».

Il fonctionne 7 jours sur 7 de 9 h à 19 h.

 L’association « France Victimes » est également joignable par mail : «victimes@france-victimes.fr.

D’autres associations peuvent intervenir comme le Centre d’Information sur les droit des femmes et des familles (CIDFF) ou Solidarité femmes par exemple.

Ces associations installent parfois des points d’accueil ponctuels dans des centres commerciaux ou autres lieux de passage.

 

-          Il est également possible pour les victimes de violences conjugales mais également les témoins de ces violences de prendre rendez-vous sur le site géré par le Ministère de l’Intérieur : www.arretonslesviolences.gouv.fr.

 

-          Il existe également une application « App’Elles » téléchargeable sur Play Store ou l’App Store.

 

Cette application propose trois services destinés à alerter, informer mais également joindre les services d’urgence.

En activant l’application, il est possible de déclencher en toute discrétion un appel vers trois proches de confiance dont les numéros auront été pré-enregistrés.

Il est également possible de contacter les numéros d’urgence : 112 (appel d’urgence européen) ou 114 (SMS d’urgence) sans connexion internet.

Dès que l’appli-alerte est déclenchée, l’appelante est géolocalisée et les bruits environnants et/ou les conversations sont enregistrés.

 

-          Comme pour les violences faites aux enfants, l’utilisation des réseaux sociaux est également envisageable ; de même qu’un appel à un professionnel comme un médecin, un pharmacien ou un avocat, par exemple.

 

Concernant les pharmacies, le dispositif d’alerte mis en place lors du premier confinement a été renouvelé à l’occasion du second : si l’auteur des violences entre avec la victime dans la pharmacie, celle-ci peut appeler au secours en prononçant le code « masque 19 ». Le pharmacien préviendra alors la police.

 

On peut également rappeler le système du « point noir » dessiné sur la paume de la main qui constitue un appel à l’aide pour violences avec difficulté de parler librement. La personne qui reçoit le message doit alors essayer discrètement engager la conversation et tenter d’orienter la victime vers des professionnels.

 

 

*Ensuite, des dispositifs d’aide par le recours à la justice :

 

 

-          L’association des Femmes Huissiers de Justice effectue gratuitement des actes comme la retranscription de SMS ou de mails, des constats de violences ou de dégradation de domicile conjugal voire des sommations de restitution de documents administratifs ou de délivrance des documents nécessaires à l’introduction de procédures d’urgence.

 

Cette association est joignable par mail : afhj.fnsf@scp-desagneaux.com

 

-          La plainte pour violences conjugales est possible auprès du commissariat de police ou de la gendarmerie mais également par courrier auprès du Procureur de la République près du Tribunal Judiciaire de son domicile.

 

-          L’ordonnance de protection judiciaire (voir article du mois de novembre 2018) qui ne nécessite pas un dépôt de plainte préalable, permet au Juge aux Affaires Familiales de prononcer dans un délai maximal de 6 jours à partir de sa saisine, une interdiction pour l’auteur des violences d’entrer en contact avec la victime et l’attribution du logement à la victime et donc l’éviction du conjoint violent.

 

Par cette ordonnance, le Juge statue également sur les mesures relatives aux enfants.

 

En cas d’attribution d’une ordonnance de protection judiciaire ou en cas de mise en œuvre de poursuite pénale pour violences conjugales, il est désormais possible depuis le mois de Juin 2020, de solliciter le déblocage de son épargne salariale pour face aux frais nécessaires.

 

 

*Enfin des outils de protection :

 

-          Le Téléphone Grave Danger (TGD) : la victime de violences conjugales qui ne cohabite pas ou plus avec le conjoint violent, peut demander à bénéficier de ce dispositif de protection.

 

Il permet une géolocalisation et une identification automatique (si la victime y consent) et il est relié, en circuit court, aux forces de l’ordre afin qu’elles puissent intervenir rapidement en cas de danger.

 

-          Le Bracelet anti-rapprochement (BAR) : la victime de violences conjugales peut alors demander à ce que, dans le cadre d’une procédure civile (Juge aux Affaires Familiales) ou pénale (Juge d’Instruction ou Juge des Libertés et de la Détention), le conjoint (ou ex-conjoint) violent soit soumis au port d’un bracelet anti-rapprochement., placé à la cheville ou au poignet.

 

Ce dispositif permet la géolocalisation du conjoint ou de l’ex-conjoint violent.

 

Un système d’alerte est déclenché lorsque l’auteur des violences conjugales s’approche de la personne protégée au-delà du périmètre défini par le Juge.

 

Dans ce cas, il est immédiatement contacté par une plateforme de téléassistance.

 

S’il ne rebrousse pas chemin, les forces de l’ordre sont alertées.

 

La personne protégée, dispose, de son côté, d’un boîtier à garder en permanence avec elle, afin d’être géolocalisée.

 

Grâce à ce boîtier, elle peut, à tout moment, contacter directement le téléopérateur.

 

Ce dispositif existe depuis le mois de septembre 2020 mais pour l’instant uniquement 5 juridictions peuvent y avoir recours : Angoulême, Bobigny, Douai, Aix-en-Provence et Pontoise.

 

En principe, ce dispositif devrait être généralisé à l’ensemble des juridictions (donc Lyon) d’ici la fin de l’année 2020 et il est prévu que d’ici cette date, 1 000 équipements de ce type seront disponibles et pourront être attribués.

 

A titre de comparaison, l’Espagne utilise ce dispositif depuis 2008.

 

Il y aurait environ 1 150 bracelets portés par des auteurs de violences conjugales et aucune femme porteuse d’une balise n’a été tuée par son ex-compagnon depuis la mise en place de ce dispositif.

 

De même, le nombre de féminicides en Espagne est passé de 76 en 2008 à 47 en 2018 alors qu’il convient de rappeler qu’il est de plus de 150 en France.

 

L’avenir nous dira si à l’instar de l’Espagne, le Bracelet anti-rapprochement constitue donc une réelle avancée dans la protection des victimes de violences conjugales notamment pendant la crise sanitaire.

 

 

A toute fins utiles, il convient de rappeler qu’une victime de violences conjugales, en danger immédiat n’a pas besoin d’attestation pour quitter son domicile.